C’était peut-être l’une des lois de finances les plus attendues sur le volet des aides à l’innovation depuis plusieurs années. Car si tous les ans, les lois de finances successives redessinent les contours de certains dispositifs fiscaux, la cuvée 2024 s’annonçait particulièrement exceptionnelle.

Une attente nourrie par les propositions du député Paul Midy en charge d’une mission parlementaire pour le compte du gouvernement sur le soutien à l’investissement dans les startups et PME innovantes. L’été dernier, lorsque le député avait remis son rapport, il avançait que ses mesures permettraient de rapporter plus de 3 milliards d’euros par an de financements supplémentaires à l’écosystème.

Sa proposition phare : la réforme du statut Jeune Entreprise Innovante avec la création de 2 nouveaux dispositifs à savoir le statut Jeune Entreprise d’Innovation et de Croissance (JEIC) et le statut Jeune Entreprise d’Innovation de Rupture (JEIR). Mais encore fallait-il que ces propositions soient adoptées par le Parlement.

Des parlementaires qui devaient également se positionner dans les derniers jours de 2023 sur la mise en place d’un autre dispositif nouveau : le Crédit d’Impôt Investissement en faveur de l’Industrie Verte (C3IV).

Alors quelles sont les mesures qui ont été finalement adoptées ? Et qu’est-ce que ça change pour les entreprises innovantes ? C’est ce qu’on vous détaille dans cet article !

1- L’évolution du statut JEI et l’arrivée du JEIC

C’est le gros morceau de cette loi de finances pour 2024. Mais pour mieux comprendre la réforme du statut Jeune Entreprise Innovante, un petit rappel s’impose.

Le statut JEI est un dispositif, réservé aux PME, qui permet aux entreprises d’obtenir 2 avantages : une réduction des cotisations patronales pendant 8 ans sur les salaires du personnel de R&D (les charges URSSAF sont quasiment divisées par 2) et une exonération de l’impôt sur les sociétés (100% d’exonération sur le premier exercice bénéficiaire et 50% sur le deuxième).

Première modification importante apportée par cette loi de finances 2024 : la suppression de l’avantage fiscal pour le statut Jeune Entreprise Innovante. Autrement dit, les entreprises créées à partir du 1er janvier 2024 qui obtiendront le statut JEI ne pourront plus bénéficier des exonérations d’impôt sur les sociétés. Elles pourront simplement profiter des réductions de cotisations patronales sur les salaires de R&D.

En revanche, les entreprises créées avant 2024 pourront quant à elles toujours activer l’exonération totale de l’IS sur le premier exercice bénéficiaire qui se présente suite à l’obtention du statut et les 50% d’exonération sur le deuxième exercice bénéficiaire. Tout cela à condition que ces exercices bénéficiaires interviennent dans les 11 premières années de l’entreprise (si l’entreprise a été créée avant 2023) ou dans les 8 premières années pour les entreprises créées en 2023. Pour mieux comprendre, on récapitule tout ça en tableau 😉

Date de création de l’entreprise Exonération de l’IS Réduction des charges URSSAF
Avant 2023 Sur les 2 premiers exercices bénéficiaires réalisés avant les 11 ans de l’entreprise Jusqu’aux 8 ans de l’entreprise
En 2023 Sur les 2 premiers exercices bénéficiaires réalisés avant les 8 ans de l’entreprise Jusqu’aux 8 ans de l’entreprise
A partir de 2024 Aucune Jusqu’aux 8 ans de l’entreprise
Simulateur JEI

Après avoir abordé cette mauvaise nouvelle, passons maintenant au volet plus réjouissant. 🙂

Pour pouvoir prétendre au statut JEI, l’entreprise doit valider certains critères et notamment avoir un volume de dépenses de R&D supérieur à 15% des charges totales de l’entreprise. Cela pouvait représenter une barrière pour certaines PME.

C’est pourquoi suivant le rapport du député Paul Midy, la loi de finances pour 2024 introduit le statut Jeune Entreprise d’Innovation et de Croissance (JEIC).

Le statut JEIC permet aussi aux entreprises d’obtenir les mêmes réductions de cotisations patronales que le statut JEI. Mais il est plus accessible car il s’adresse aux PME qui réalisent des travaux de Recherche et Développement (R&D) pour un montant représentant entre 5% et 15% de leurs charges totales. Cela représente donc un bel assouplissement. En revanche le statut JEIC n’offre pas d’avantage fiscal. Autrement dit, il n’y a pas d’exonération d’impôt sur les sociétés pour les entreprises qui bénéficient de ce dispositif.

À noter que comme pour le statut JEI, avec le JEIC le montant de l’exonération sur les charges sociales est plafonné à 231 840 € par établissement et par année civile (un plafond très confortable qui est atteint par très peu d’entreprises).

Pour être JEIC, les PME doivent également répondre à des indicateurs de performance économique définis par décret qui seront communiqués ultérieurement par l’administration. Ces indicateurs visent à évaluer la croissance et la performance économique globale de l’entreprise.

Il est aussi important de noter que les personnes physiques résidant en France qui investissent au capital initial ou aux augmentations de capital des JEI entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2028 bénéficieront d’une réduction d’impôt au taux de 30 % ou 50 % selon la part des dépenses en R&D des entreprises concernées. Cette réduction sera applicable dans la limite de 75 000 euros pour les célibataires et de 150 000 euros pour les couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité.

En parallèle de la mise en place du statut JEIC, le rapport Midy proposait l’introduction d’un dispositif complémentaire destiné aux PME de la deeptech : le statut Jeune Entreprise d’Innovation de Rupture (JEIR).

Le statut JEIR ciblait les entreprises engageant au moins 30 % de leurs dépenses totales dans les travaux de R&D. Ce statut JEIR devait notamment leur permettre de profiter des réductions de charges Urssaf sur les salaires de R&D pendant les 12 premières années de l’entreprise (contre 8 ans pour le statut JEI et JEIC).

Mais ce statut JEIR n’est finalement pas instauré par la loi de finances pour 2024.

2- Introduction du Crédit d’Impôt Investissement pour l’Industrie Verte (C3IV)

La loi de finances valide la mise en place du Crédit d’Impôt Investissement pour l’Industrie Verte (C3IV) à partir du 1er janvier 2024. Ce dispositif a pour objectif de stimuler la transition écologique en soutenant les entreprises opérant dans certains secteurs clés de l’énergie verte.

Concrètement, les entreprises éligibles obtiendront un crédit d’impôt de 20 à 60% sur leurs investissements afin de se doter de moyens de production pour réaliser des équipements, des composants ou des matières premières dans les 4 secteurs suivants : les batteries, les panneaux solaires, les éoliennes, les pompes à chaleur.

Autrement dit, le C3IV ne vient pas financer une activité d’innovation ou de R&D mais bien les investissements réalisés en amont (notamment l’achat de machines, de brevets ou la construction de bâtiments) dans le but de réaliser des activités dans les 4 secteurs stratégiques évoqués.

Le taux du C3IV et son plafond dépendent de la taille et de la localisation de l’entreprise :

Taux normal Zone d’aide à finalités régionales (ZAFR) Zones ultrapériphériques
Plafond de crédit d’impôt 15 millions d’euros 200 millions d’euros 350 millions d’euros
Grandes entreprises 20% 25% 40%
Moyennes entreprises 30% 35% 50%
Petites entreprises 40% 45% 60%

Afin de bénéficier du C3IV, les entreprises sont tenues de déposer une demande d’agrément au préalable de toutes dépenses (ou au préalable du commencement des travaux dans le cadre de la construction d’un bâtiment) auprès de la Direction Générale des Finances Publiques. Il faut soumettre la demande d’agrément avant le 31 décembre 2025.

Pour plus de précisions sur le C3IV comme les dépenses éligibles, le détail des filières concernées et les autres conditions d’éligibilité, ça se passe ici :
➡️ Tout savoir sur le C3IV

3- Pas de changement pour le CIR et le CII

Avec l’arrivée de ces nouveaux dispositifs, on en oublierait presque de parler du Crédit Impôt Recherche (CIR) et du Crédit Impôt Innovation (CII). Si ces dispositifs ont fait l’objet de plusieurs rumeurs ou propositions au cours des derniers mois, ils n’ont subi aucune modification cette année.

Ainsi le projet du Sénat visant à doubler le plafond du crédit d’impôt innovation en 2024, le faisant passer de 400 000 € à 800 000 € n’a pas abouti.

En revanche, c’est l’occasion de rappeler que la loi de finances pour 2023 avait fait passer le taux du crédit impôt innovation de 20 à 30%. Comme ce taux s’applique sur les travaux en innovation réalisés à partir du 1er janvier 2023, les entreprises vont vraiment en bénéficier à partir de cette année 2024 car le CII 2023 se déclare en 2024 (avant le 15 mai 2024 pour les entreprises qui clôturent au 31 décembre).

Alors qu’on pouvait imaginer beaucoup de changements avec cette loi de finances 2024, on reste sur une certaine stabilité concernant les principaux dispositifs. La nouveauté réside essentiellement dans l’arrivée du statut JEIC, la suppression de l’exonération d’IS pour les entreprises bénéficiaires du statut JEI et la mise en place du Crédit d’Impôt Investissement pour l’Industrie Verte (C3IV).

Nous espérons que cet article vous a permis d’y voir plus clair sur cette loi de finances pour 2024 ! Mais si vous avez des questions sur toutes ces aides à l’innovation, les critères d’éligibilité ou les démarches à réaliser pour les obtenir, nous sommes à votre écoute. Il vous suffit de prendre RDV juste ici :

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